Si en 2011 certains payent plus de 1000 euros pour faire une cure dans un spa avec des algues, d’autres vont y voir le diable quand l’algue s’échoue sur une plage. Deux notions de la post modernité assez troublantes. Face à un monde où même la nature est mondialisée, certains estiment sous l’emprise du dieu progrès que le progrès devrait être un univers où nous n’aurions que du positif. Il est vrai qu’à force de vivre dans des mégapoles où le temps n’existe plus et la nature limitée à des jardinières, on a oublié que nous vivons dans des éco systèmes vivants et qu’il appartient à chacun de donner son sens à son éco système. Face à un déracinement et un abandon de la fonction de discernement, les débats semblent se réfugier dans l’émotion, les représentations symboliques, les peurs, les ressentis… sans tenir compte des faits, du monde réel. A l’instar de l’économie qui est devenue virtuelle, la pensée serait elle devenue déconnectée de la réalité ? Dans ce théâtre d’ombres chinoises, on agite les algues comme des éventails, sans vraiment réfléchir de façon systémique, à replacer le rôle chaque élément dans un environnement dynamique.
Il est vraisemblable que notre changement de paradigme, provoque plus de tétanie que d’envie d’être acteur, d’apporter sa contribution. La tentation est grande de faire le mort quand il faudrait changer, d’être dans le déni de l’inconfort et opter pour l’indécision.
Après avoir vécu une décennie caractérisée par des chocs à répétition, s’accrocher au connu c’est tentant. A ce titre la société civile organise le statut quo que cela soit dans l’enseignement, les institutions, les croyances, etc pour masquer la nécessité d’une reconstruction du monde (dire ré-enchantement), opter aujourd’hui pour des virages dans nos comportements, stratégies, valeurs.
Dans le même temps, l’individualisme est devenu un nouveau crédo et l’engagement pour des projets collectifs prend d’autres formes, puisque que la générosité, le bénévolat, la coopération gracieuse n’est possible que si cela est compatible avec son propre agenda du bien être… Ce culte du « moi d’abord », devrait vraisemblablement créer un trou générationnel dans les grands projets socio culturels avec une forme de désengagement des citoyens qui vont privilégier leur qualité de vie. Le culte du héros ayant disparu, ceux qui vont faire preuve d’abnégation seront de moins en mois nombreux, et il est possible que les personnages ayant une vocation à être de grands leaders seront des espèces protégées. Pour autant le don de soi et l’implication va toujours exister, mais dans un contexte facilitant (par exemple en postant sur les réseaux sociaux).
Pour vivre dans ce nouveau monde, peut être faudra t il 1, 2 ou 3 générations pour modifier notre « ADN »…En attendant 2 mondes cohabitent et s’ignorent : les boomers qui sont dans une logique du pouvoir et détiennent les manettes (et reproduisent le passé) versus les digital natives qui veulent exprimer leur potentiel mais sans contrainte (et veulent implanter d’autres règles du jeu).
Dans cet entre deux mondes, plus que jamais il faut ouvrir de nouveaux lieux de réflexion, de nouvelles agoras, pour que chacun puisse se réapproprier son environnement, lui trouver du sens, développer son questionnement. Car dans cette période de chaos et d’incertitude, c’est déjà de rendre intelligible son propre environnement local, de recréer du lien social, de produire de nouvelles histoires pour reforger l’envie dans nos trajectoires de vie.