Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

RETAIL BANK 2015 : la fin du client objet ?

 

Cela fait plusieurs décennies que le système bancaire s’est organisé pour gérer de l’argent, avec un rapport de force incroyable entre la banque et le client final, presque un rapport parent/enfant où il est difficile de discuter. C’est tout un système dominateur dont le pilotage est guidé par sur le Retour sur Investissement, et très peu par la satisfaction client. A ce jour, il y a très peu de clients [particuliers ou entreprises] qui vont inverser ce consensus mou, avec une relation asymétrique où la banque gagne à chaque fois, comme au casino.

La crise financière a mis à nu un système de façon crue, en nous rappelant les rémunérations pratiquées par le head management des banques, même si les petits épargnants ou clients, après une légère indignation ont renoué avec une amnésie flottante sur un système non satisfaisant. Il y a des banques qui, culturellement, sont restées proches de leurs clients. Même s’il y a des guichetiers et quelques conseillers qui arrivent à générer un « lien social / chaleureux [ ?] / Empathique » le client est une machine à acheter des produits ultra marketés.

Nous sommes dans des usines bancaires où des marketeurs inventent de nouveaux produits que doivent vendre les « points de vente », avec des procédures normalisées, des tableaux croisés, des scorings, des suivis pointus de l’activité commerciale et souvent des processus de décision qui remontent au niveau central. Cette industrialisation à outrance du secteur résulte largement du mouvement de dérégulation et de mondialisation. Pour quand une banque indienne ou chinoise à côté de votre boulangerie traditionnelle ?

Les outils de gestion industrielle focalisent sur les sources de revenu et ne permettent pas d'avoir un plan large de ce qui se passe dans la société, donc des préoccupations croissantes des gens face à une crise qui est en train de miner nos modes de vie et les avenirs que nous nous représentions. De ce fait, au lieu d'inventer les produits et les services correspondants à cette nouvelle situation, au lieu de produire une nouvelle promesse corporate axée par exemple sur la proximité et la solidarité, on reste dans l'optimisation du métier actuel, issu des trente glorieuses et de la bancarisation. Des organismes comme le BCG mettent en évidence le manque de préparation du home banking aux évolutions des consommateurs, aux méga tendances sociétales.

Qui d’ailleurs arrive à s’étonner de la distribution de prêts à gogo…à des ménages déjà surendettés ? Nous frôlons les limites d’un système qui se cannibalise tout seul, puisqu’il s’agit d’un capitalisme financier, où l’intérêt du client final n’est pas intégré. On peut se retrouver avec des clients ayant souscrit des produits inadaptés ou parfois toxiques [quand l’inadaptation a des conséquences très négatives].

Pendant ce temps l'économie démonétisée est en marche : cette économie réelle et quotidienne où l'argent - les monnaies officielles des États - ne joue presqu'aucun rôle et qui génère, à tour de bras, valeurs et emplois. Les transactions qui s'y font se réalisent en l'absence des monnaies officielles: trocs, bénévolats, "open source", pros mérismes, monnaies privées...[cf. ouvrage de Marc Halévy]. L’argent, n’est plus le pivot incontournable, car il y a d’autres systèmes de transactions, d’autres circuits. Il y a des circuits à base de citoyenneté ou solidarité. Les entreprises s’organisent aussi en fonction d’intérêt commun dans des groupes qui ont du sens.

Mais surtout, il va y avoir la génération Y, qui va arriver avec d’autres référents, sans la peur du grand méchant loup, et vont raisonner cash [sans jeu de mot] en déterminant de façon cynique ce qui est le plus avantageux de leur point de vue, d’autant plus qu’ils sont 100% techno inside et savent repérer les meilleures offres [ce qui va être crucial, car ils savent que l’argent sera plus rare dans le futur… pour eux].

Autre signal faible, il y a une partie de la population française à la recherche d’une vie qualitative, qui va consommer différemment, plus minimaliste, appelons les Free-lifers [http://www.scribd.com/doc/45163287/Les-Free-Lifers-Rene-Duringer-Dec2010-Free-Lifers]. Sachant qu’ils vont avoir la manie d’aller à l’essentiel, au fonctionnel, il est vraisemblable qu’ils ne vont pas consommer tous les services et produits du système bancaire ! Toute la créativité des banques pour multiplier à l’infini les produits risque de désagréger face à la contraction du pouvoir d’achat des ménages qui vont passer au karcher ce qui n’est pas prioritaire, stratégique, vraiment utile. Or l’enjeu, c’est plutôt d’ouvrir le chantier de la course à la productivité, du reengineering… pour voir comment mieux associer les clients dans la chaine de valeur.

En 2011, c’est la consécration de vraies offres de banques en ligne avec des services gratuites [la première tentative, date du temps de la nouvelle économie avec ZE BANK], qui vont venir taquiner les systèmes traditionnels. Après les banques néerlandaises qui ont fait office très tôt de challenger, de nouvelles offres arrivent [ex : Fortunéo]. Il y aura d’autres offres low cost à venir !

En ce qui concerne le micro crédit, s’il faut encore attendre une version plus stable compte tenu de l’expérience de ces dernières années, mais il est sûr que tous les systèmes communautaires auront un gros avenir. L’organisation de solidarités dans le financement est indissociable d’une économie alternative en plein développement [voir offre dans les salons professionnels].

On pourra de plus en plus emprunter ou prêter voir placer de l'argent sans passer par le système bancaire classique mais en le contournant.

Rappelons aussi les moyens de paiement via le web, qui deviennent un nouvel outil de base pour tout internaute [PayPal, mais il y a d’autres formules de micro paiement sur le net]. Voir aussi bientôt la fin des chèques et l’avènement des SEPA. L’argent est digital. En attendant, voir le procédé qui permet d’utiliser son iphone pour faire des remises de chèques ! De toute manière de plus en plus de transactions passeront par le WEB. Qui gagner la mise ?

Aujourd’hui les banques sont devenues des supérettes où l’on vend [vent ?] du crédit, des assurances, de l’immobilier, des mobiles, des ordinateurs, des voyages, bientôt des micro-ondes ? A ce rythme, les banques vont ressembler à ces pharmacies qui ressemblent à des boutiques dédiées au bien être, où l’on oublie que l’on y vend aussi des médicaments ! Rajoutez à cela un chargé de clientèle qui va vous accompagner pendant quelques mois avant d’être muté. Résultat, un interlocuteur qui apprend sur votre compte, qui a une mémoire de poisson rouge, roule avec le frein à main et donc avec aucun conseil, juste la capacité à réciter un argumentaire du siège. Dans le même temps, le consommateur a un niveau d’exigence plus élevé dans son expérience avec son banquier et une performance financière différente…

Donc où le « client de base » va-t-il trouver du conseil ? En qui peut-il avoir confiance et discuter avec un interlocuteur qui cherche à défendre vos propres intérêts ? Pour les plus fortunés, beaucoup n’ont plus besoin de passer par les banques pour gérer leur patrimoine avec des conseils indépendants.

« La rencontre avec les vendeurs et conseillers dans les espaces physiques sera réservée à la relation de confiance et au dialogue. Elle exigera une écoute fine, personnalisée, respectueuse du client, la compréhension de ses rêves, de ses projets, de ses défis, de ses problèmes. Les agences bancaires disparaîtront au profit d eboutiques pour réaliser les rêves, où les clients pourront vivre un continuum entre l'univers virtuel et l'univers réel. La banque de détail qui survivra sera celle qui offrira le luxe suprême: un visage humain, lorsque celui-ci aura quasiment disparu de toutes les relations marchandes. A ce luxe n'accéderont que les clients encore capables de savoir ce que c'est que l'humain. Le nombre d'agences bancaires est donc appelé à se réduire drastiquement autour de 2020. Il y aura des "friches bancaires", comme il y a eu des friches industrielles. Sur ce point, comme d'habitude, la Finlande est en avance. Christian Mayeur »

En l’état actuel, il est peu probable que les boomers seront les révoltés qui vont donner des coups de boutoir à des systèmes financiers politiquement corrects.

Pour tous les acteurs du système bancaire, l’enjeu c’est de mener une vraie révolution, lancer des innovations, revoir un système de relation ship plus crédible, une vraie empathie, une prise de risque, une écoute ! Il faut privilégier le client ROI et non le ROI [Return on investment]. Peut-être revenir vers leur cœur de métier et stopper la diversification tout azimut ? Aujourd’hui les technologies permettent de reconstruire une chaine de valeur au profit du client final. On peut ainsi constater que les services de mobile banking sont encore rares ou poussifs.

Dans ce contexte, il faudra observer la stratégie des acteurs du monde mutualiste ou public. Aujourd’hui le paradoxe, est qu’ils ont voulu adopter l’ADN des banques privées au moment, où cette empathie sociale aurait été un atout concurrentiel. En effet un des enjeux, c’est de conserver son crédit moral à l’égard de ses clients, est dégager une confiance naturelle.

Les plus cyniques miseront sur la capacité de soumission et d’inertie des clients, englués dans des clichés pour les relations banques/clients ? Ne pas faire de vague…Le seul accélérateur pour avoir des effets visibles, serait l’arrivée massive de nouveaux challengers extérieurs au small world du retail banking ? On sait déjà que des innovateurs se préparent à inventer les pratiques responsables de la banque de demain, même s’il s’agit d’activités de niche dans un premier temps.

 En l’absence de menaces lourdes, on peut se demander si les acteurs traditionnels du secteur vont se réformer en profondeur pour aller vers une relation gagnant-gagnant avec ses clients ? En attendant, en silence, un autre système s’organise à la périphérie des « Apparatchiks du dernier siècle », de façon lente mais certaine… Certes la résistance au changement peut s’expliquer. C'est structurel : croyances qui aveuglent, nombrilisme, lourdeur de manœuvre, lenteur de l'anticipation, réactions tardives et inappropriées. Il s’agit de paquebots qui changent très lentement de cap.

Le versant positif c’est que tous les acteurs du secteur bancaire auront besoin d’être accompagnés dans ces nouveaux enjeux, la grande mue !

 Tags à suivre : mobile banking, home banking, retail banking, gestion de finances personnelles, dématérialisation des chèques, personnalisation de l'espace, Signature électronique, dématérialisation, interfaces riches, convenience banking, high tech banking, life assistance banking, bank industrialisation, retail banking technologie, technologie enablers, channel, poor banking, ethique, solidarité, community banks, universal banks, spécialistes, non-bank banks, low cost

A suivre dans les prochains mois : jechangedebanque.org, la NEF, le Crédit coopératif [ ?], Grameen Bank, la future Banque Ethique Européenne, Fortuneo, Binck bank, Monabanq, Boursorama, ING direct, e.LCL, les banques islamistes [ ?], les nouveaux projets innovants de financement solidaire/citoyen, etc

 

ps. cet article a été rédigé avec une intention rédactionnelle dramatique pour mieux souligner les enjeux du secteur et donc n'ont pas pour objectif de déclencher une polémique ou de déstabiliser les acteurs. C'est uniquement à visée pédagogique pour contribuer au processus de mue, puisque nous sommes tous clients du secteur bancaire !

 

Les commentaires sont fermés.